Cette semaine, Me Dominique Tardif, de ZSA, s’entretient avec Me Nancy Leggett-Bachand, directrice générale de Pro Bono Québec depuis 2013…
1- Pourquoi avez-vous, à l’origine, décidé d’être avocate plutôt que de choisir un autre métier ou une profession?
À dix-huit ans, je voulais devenir journaliste. On m’a alors confirmé qu’il s’agissait d’une bonne idée, en me demandant du même coup : « mais qu’est-ce que tu vas communiquer, exactement »? J’ai alors compris de mes conversations que, pour mener une telle carrière en journalisme, il était important d’avoir « du bagage », une expérience de vie et un certain recul…que je n’avais pas encore.
J’ai donc suivi le conseil et ai décidé de faire mon droit pour acquérir ces connaissances qui me manquaient. J’ai ensuite étudié en journalisme et communications publiques par les soirs, tout en travaillant comme avocate. Après deux ans de pratique en droit des assurances, j’ai quitté pour retourner sur les bancs d’école et compléter un DESG aux HEC. M’étant ensuite fait offrir un poste très intéressant en communications, j’ai finalement mis de côté le journalisme. Le droit, la gestion et les communications sont trois disciplines qui, pour moi, se sont très bien mariées tout au long de ma carrière.
2. Quel est le plus grand défi professionnel auquel vous avez fait face au cours de votre carrière?
Mon plus grand défi est survenu en 2013. Ceux qui me connaissent savent que deux grandes causes me tiennent à cœur, à savoir l’accès à la justice et l’alphabétisation. J’étais alors Directrice générale de Pro Bono Québec ainsi que Présidente du conseil d’administration de la Fondation pour l’alphabétisation.
Les deux organisations rencontraient, au même moment, des enjeux de pérennité : nous faisions face à des défis quant au financement, aux ressources humaines, à la logistique ainsi qu’aux modèles d’affaires des organisations. L’automne 2013 fut donc chargé et très intense, d’autant plus que je complétais en même temps mon cours du Collège des administrateurs de sociétés. Tous ont été mis à contribution, qu’il s’agisse des membres de chaque conseil d’administration, des employés, des partenaires, etc. Il fallait passer à travers cette période tumultueuse et ces changements, tout en préservant ce que j’appellerais « l’ADN » de chaque organisation.
Ce fut donc beaucoup de temps et d’énergie investis, mais pour le mieux : aujourd’hui, les deux organismes s’en portent très bien!
3. Si vous aviez une baguette magique, que changeriez-vous à la pratique du droit?
L’accès à la justice me tient beaucoup à cœur. Si j’avais une baguette magique, j’inciterais fortement les 25 000 membres du Barreau du Québec à redonner à tous les ans à une cause de leur choix par le travail pro bono. Beaucoup de gens le font dans l’ombre, et je leur lève mon chapeau. D’autres, cependant, sont malgré eux tellement pris par leur travail quotidien qu’ils ne trouvent pas les occasions d’aider, étant trop absorbés par autre chose. Parce que nous, les avocats, sommes des privilégiés de la société, il est impératif de s’arrêter quelques instants pour redonner.
4- Qu’avez-vous à dire de la perception du public envers la profession et les avocats en général?
Beaucoup d’avocats redonnent à la société et, ce faisant, changent la vie des justiciables et, par la même occasion, leur perception de la profession. Chez Pro Bono Québec, plusieurs des personnes à qui nous parlons n’ont pas les ressources financières pour se payer les services d’un avocat. Ceux-ci perçoivent souvent les avocats comme étant inaccessibles vu les coûts, les délais et le langage juridique.
C’est une belle surprise de constater à quel point la perception de ces gens peut changer radicalement, et pour le mieux, lorsque nous les mettons en contact avec un avocat, ne serait-ce pour un conseil, et ce, même quand l’avocat ne prend pas, pour une raison ou une autre, la cause par la suite. Ce premier contact avec l’avocat est un pas vers le changement de cette perception parfois défavorable et vers la démocratisation de la profession.
5. Quel conseil donneriez-vous à quelqu’un qui, comme vous, a fait son droit mais…veut en sortir?!?
Il est évidemment important d’étudier, mais il l’est tout autant de s’impliquer et de se diversifier. C’est souvent ainsi, en effet, qu’on découvre ses véritables intérêts et ses valeurs, ce qui est ensuite bien utile pour trouver un emploi qui nous correspond vraiment. S’impliquer permet aussi de rayonner, ce qui peut nous amener à faire éventuellement autre chose que la stricte pratique juridique. Cela permet par ailleurs de développer un réseau de contacts et, si on a la même chance que moi, de rencontrer sur son parcours des mentors en provenance d’autres domaines qui nous incitent à ouvrir nos horizons.
· Ses bons livres de l’été 2016 – Nord Alice (auteur : Marc Séguin), La Part des Choses (auteur : Benoîte Groult) et The Children Act (auteur : Ian McEwan).
· Le dernier bon film qu’elle a vu – La Tête haute, un film avec Catherine Deneuve (réalisatrice : Emmanuelle Bercot)
· Sa chanson fétiche – « Je veux » (Interprète : Zaz)
· Son expression préférée – « Je traverserai le pont une fois rendue à la rivière »
· Son péché mignon – les biscuits de ses filles!
· Son restaurant préféré – Le H4C (Place St-Henri)
· Un pays qu’elle aimerait visiter – le Bouthan
· Le personnage historique qu’elle admire le plus – Nelson Mandela, qui a dit que l’éducation est l’arme la plus puissante pour changer le monde, ce dans quoi je crois fermement.
· Si elle ne faisait pas le métier qu’elle fait aujourd’hui, elle serait : journaliste ou entrepreneure!
Avant de se joindre à Pro Bono Québec, Me Legett-Bachand a été Directrice générale de Mise sur toi, du Conseil Québécois du commerce de détail et de Hebdos Québec.
Membre du Barreau du Québec depuis 1992, elle a fait son droit à l’université du Québec à Montréal. Elle est administratrice de sociétés certifiée, détient un diplôme d’études supérieures en gestion du HEC et un certificat en relations publiques de l’Université de Montréal. Me Legett-Bachand est très active au sein de la communauté juridique, dont par le biais de nombreuses conférences. Elle siège et a siégé sur plusieurs conseils d’administration, dont ceux de la Fondation pour l’alphabétisation, de la Société canadienne des directeurs d’associations et du Conseil de presse du Québec.