Cette semaine, Me Dominique Tardif, de ZSA, s’entretient avec Me André Desautels, le Vice-président, affaires juridiques et conseiller juridique principal de WSP Canada Inc….
1. Pourquoi avez-vous, à l’origine, décidé d’être avocat plutôt que de choisir un autre métier ou une autre profession?
Ma mère, qui était parajuriste, m’avait conseillé de ne pas aller en droit et de plutôt me diriger vers n’importe quel autre métier! Je crois qu’elle était d’avis que les gens, dans cette profession, travaillaient très fort et qu’il était difficile de maintenir un équilibre. Je ne suis évidemment pas allé en droit par simple esprit de contradiction (à tout le moins pas sciemment!), mais la coïncidence me fait sourire encore aujourd’hui.
J’avais toujours trouvé que le droit était une discipline intéressante, et je savais qu’il s’agissait d’une bonne formation universitaire. Il s’agissait pour moi, à l’époque, de quelque chose de temporaire, comme mon objectif était de retenter ma chance en médecine, où je n’avais pas été accepté la première fois. L’histoire en a fait autrement : je suis, tout simplement, tombé en amour avec la profession!
2. Quel est le plus grand défi professionnel auquel vous avez fait face au cours de votre carrière?
Mon plus grand défi professionnel, je l’ai vécu alors que j’étais basé en Suisse et que je travaillais quotidiennement avec des gens de partout à travers le monde, qu’il s’agisse de l’Asie, des Indes, du Moyen-Orient ou de l’Afrique. Faire du droit en travaillant avec des gens d’autres cultures est un défi – un défi intéressant! En effet, chaque pays, chaque culture a sa façon de faire et de transiger : il faut en être conscient et savoir respecter cela, ce qui n’est pas le lot de tous. Il est parfois possible de penser bien faire et, à l’inverse, d’en insulter certains. C’est un peu comme passer à travers un champ de mines, parfois! Le défi consiste à s’adapter à ces façons de faire et à réussir à supporter son client, peu importe le contexte. J’ai eu la chance d’avoir une expérience culturelle assez diversifiée et qui m’a beaucoup appris.
3. Si vous aviez une baguette magique, que changeriez-vous à la pratique du droit?
Si j’avais une baguette magique, je changerais la perception des non-juristes envers la profession juridique, ainsi que celle des jeunes avocats qui commencent. Un certain élitisme entoure la profession, alors que le droit se doit pourtant d’être un service accessible.
Certains jeunes entrent, en effet, parfois en droit avec de fausses attentes quant à la possibilité de faire partie de l’élite sociale, d’avoir accès à des salaires très élevés, etc. Il faut évidemment prendre la profession au sérieux, mais sans se prendre soi-même au sérieux. Le milieu ne devrait pas, à mon avis, être ouvert au snobisme : nous y sommes pour aider nos clients, qu’il d’agisse d’individus ou d’entreprises. Je crois que cet aspect altruiste qui va de pair avec la profession est parfois mal communiqué aux jeunes d’aujourd’hui, et qu’il a par ricochet des conséquences sur la perception générale.
4- La perception du public envers la profession et les avocats en général est-elle plus positive, égale ou moins positive qu’elle ne l’était lors de vos débuts en pratique? Et pourquoi, à votre avis?
À mon avis, la perception s’améliore. Je pense, en effet, que les avocats sont plus ouverts d’esprit et plus humbles qu’autrefois. Une belle simplicité s’installe peu à peu – et c’est à continuer! Évidemment, la justice demeure très peu accessible, et il est du devoir de l’avocat de faire du pro bono afin d’aider les gens qui n’ont pas les moyens de recourir aux services juridiques à y avoir accès. On oublie, trop souvent, que le public ne comprend souvent pas le système judiciaire, qui est complexe et donc insécurisant pour bon nombre de gens. Les citoyens deviennent parfois très inquiets après avoir reçu une simple lettre ou une contravention. Nous sommes, comme avocats, très privilégiés, ayant accès à une belle profession et à des emplois enviables, et avons en conséquence un devoir d’accompagnement et d’assistance.
5. Quel conseil donneriez-vous à quelqu’un débutant sa carrière et voulant devenir chef des affaires juridiques?
Le succès passe, à mon avis, par une combinaison de caractéristiques et compétences à développer. Il faut « avoir faim », être humble professionnellement, savoir dans quoi on excelle et dans quoi on est moins bon, vouloir apprendre et savoir développer son « côté humain ». En effet, le fait d’avoir le meilleur jugement juridique n’aide en rien à superviser des gens si le côté humain n’y est pas!
Richard Branson a dit qu’il ne faut pas accepter de se faire dire non ou de se faire dire qu’on est incapable. Si on veut réussir, il faut croire en soi et, ultimement, être convaincu pour être convaincant. J’ai pour ma part grandi sur une terre. Mes parents ont travaillé très fort pour me donner accès à l’école privée. Outre le fait d’apprendre, l’école m’a mise en contact avec des gens qui croyaient dans le fait que ‘vouloir, c’est pouvoir’. Je crois que, pour réussir, il faut un plan et qu’il faut, surtout, y croire, en n’ayant pas peur de prendre certains risques.
· Le dernier bon livre qu’il a lu – « Screw it, let’s do it» (auteur : Richard Branson).
· Le dernier bon film qu’il a vu – «The big short» (réalisateur : Adam McKay)
· Une chanson qu’il aime écouter de temps à autre – « Tue-moi » de Dan Bigras.
· Son expression préférée – «Lead, follow or get out of the way! »
· Il adore… prendre une bière les deux pieds dans le sable après une journée de surf!
· Son restaurant préféré – Graziella (rue McGill)
· De retour au Canada, il rêve parfois de… l’élégance de l’Europe et de la force de l’Inde.
· Le personnage historique qu’il admire le plus – Nelson Mandela, ayant beaucoup d’admiration pour les gens qui sont prêts à se battre pour leurs convictions.
· S’il n’était pas avocat, il serait…pilote de combat!
Me Desautels apporte avec lui dix-huit ans d’expérience en gestion de négociations internationales complexes, support aux opérations, fusions & acquisitions, transformations organisationnelles et conformité. Il travaille main dans la main avec l’entreprise pour offrir des conseils juridiques judicieux et une pensée novatrice supportant la croissance organisationnelle.
Avant de joindre WSP, Me Desautels a été vice-président mondial des contrats et officier de conformité pour AGT International, une compagnie mondiale et en croissance dans la gestion de données et de data basée à Zurich, en Suisse. Il a auparavant occupé divers postes de chef des affaires juridiques à Toronto, New York et Montréal.
André est titulaire d’un baccalauréat en droit de l’Université d’Ottawa ainsi que d’un MBA de l’Université du Québec à Montréal. Il est membre du Barreau du Québec depuis 1996.